Produit fermenté originaire d’Indonésie, plus précisément de l’île de Java, le tempeh se distingue comme une matrice alimentaire complexe, issue d’un processus de fermentation contrôlée de graines de soja par un champignon filamentaire du genre Rhizopus, généralement Rhizopus oligosporus. Ce processus aboutit à la formation d’un substrat mycélien compact et cohérent, doté de propriétés organoleptiques et nutritionnelles remarquablement modulées par les conditions de fermentation.
Contrairement à des produits analogues comme le tofu (coagulation de protéines dans un milieu aqueux), le tempeh résulte d’une fermentation solide à température ambiante, où les interactions entre protéines, lipides, fibres et micro-organismes induisent une transformation enzymatique poussée. L’amidon est partiellement hydrolysé, les protéines prédigérées par les enzymes extracellulaires du mycélium, et la biodisponibilité des minéraux — en particulier le zinc et le fer — significativement augmentée grâce à la dégradation de l’acide phytique.
Par conséquent, le tempeh peut être considéré comme un symbiote alimentaire — à la croisée de l’aliment fonctionnel et du ferment vivant — conférant à l’hôte humain un apport synergique en macro- et micronutriments, en plus de fibres prébiotiques modulant potentiellement le microbiote intestinal.
Comment est fabriqué le tempeh ?
La fabrication traditionnelle du tempeh repose sur un enchaînement précis d’étapes biotechnologiques. D’abord, les graines de soja sont trempées pendant 24 heures pour initier une préfermentation lactique naturelle, ce qui adoucit la texture, favorise l’élimination des inhibiteurs enzymatiques et amorce la dégradation de la paroi cellulaire.
Après trempage, les graines sont partiellement décortiquées, puis cuites à 90–100 °C pendant 30 à 60 minutes. Ce traitement thermique facilite la gélatinisation de l’amidon et la désactivation des agents antinutritionnels. Une fois refroidies à température ambiante, les graines sont ensemencées avec une culture de Rhizopus oligosporus, généralement à raison de 0,1 à 0,5 % du poids total.
L’inoculation est suivie d’une incubation en atmosphère contrôlée (température de 28–32 °C, humidité relative de 70–80 %) pendant 24 à 48 heures. Durant cette phase, le mycélium se développe rapidement, formant un réseau dense qui lie les graines entre elles et génère un gâteau ferme, blanc et légèrement duveteux.
Comment cuisiner le tempeh ?
Le tempeh est un aliment culinaire extrêmement polyvalent. Sa texture ferme et son goût de noisette légèrement fermenté se prêtent à une multitude de préparations. Toutefois, pour révéler tout son potentiel organoleptique, une étape de précuisson ou de marinade est souvent recommandée.
Une méthode courante consiste à couper le tempeh en tranches fines ou en cubes, puis à le faire cuire à la vapeur pendant 10 minutes. Cette étape permet d’atténuer l’amertume résiduelle, tout en favorisant l’absorption des arômes de la marinade. Les marinades à base de sauce soja, vinaigre de riz, gingembre, ail, sirop d’érable ou citron sont particulièrement efficaces.
Le tempeh peut ensuite être grillé, poêlé, rôti ou même incorporé à des currys, des sautés de légumes, des burgers végétaux, ou des préparations asiatiques traditionnelles comme le tempeh bacem (caramélisé dans un mélange de sucre de palme et de tamarin). Il est également excellent émietté en remplacement de la viande hachée dans des sauces ou des tacos végétariens.
Un aliment postbiotique ?
Les récentes avancées en métagénomique nutritionnelle permettent de classer le tempeh parmi les postbiotiques alimentaires. En effet, le produit final contient non seulement des cellules fongiques mortes (du fait d’une cuisson éventuelle avant consommation), mais aussi des métabolites bioactifs stables, tels que des peptides antioxydants, des isoflavones aglycones, et des acides gras à chaîne courte produits in situ pendant la fermentation.
Ces molécules exercent des effets potentiels sur la réduction du stress oxydatif, la modulation hormonale via les récepteurs aux œstrogènes (notamment chez les femmes ménopausées) et l’amélioration de la sensibilité à l’insuline. Il s’agit donc d’un aliment particulièrement prisé dans certaines approches nutritionnelles comme la médecine fonctionnelle ou la diététique végétalienne optimisée.
Aspects technologiques et enjeux agro-alimentaires
La production industrielle de tempeh repose sur un équilibre délicat entre standardisation et respect du biotope microbien d’origine. Les défis résident dans la maîtrise des paramètres thermodynamiques (température, humidité, aération), le choix du substrat (variétés de soja non transgéniques, partiellement décortiquées) et l’innocuité microbiologique, notamment face aux risques de contamination par des micro-organismes indésirables comme Enterobacteriaceae ou Staphylococcus aureus.
Des travaux sont en cours pour diversifier les substrats (pois chiches, lentilles, céréales anciennes) et étendre la notion de tempeh au-delà du soja, dans une perspective de transition protéique durable. Ces innovations visent à démocratiser l’accès à des protéines végétales fermentées tout en conservant l’intégrité fonctionnelle du produit original.
FAQ : Questions fréquentes sur le tempeh
Le tempeh est-il un aliment cru ou cuit ?
Le tempeh est traditionnellement cuit à la vapeur après fermentation pour garantir sa sécurité alimentaire. Toutefois, certains adeptes de la cuisine crue le consomment sans cuisson, ce qui n’est pas recommandé sans garanties microbiologiques.
Le tempeh contient-il du gluten ?
Le tempeh de soja pur est naturellement sans gluten. Cependant, certains produits industriels peuvent contenir des céréales (blé, orge) ajoutées, donc il est essentiel de lire les étiquettes.
Quelle est la différence entre le tempeh et le tofu ?
Le tofu est obtenu par coagulation du lait de soja, tandis que le tempeh est une fermentation solide des graines de soja entières. Le tempeh est plus riche en fibres, plus dense, et possède une saveur plus prononcée.
Peut-on faire son propre tempeh à la maison ?
Oui, mais cela nécessite un inoculum de Rhizopus, une maîtrise de la température (28–32°C), une bonne hygiène, et un substrat bien préparé. De nombreuses recettes sont disponibles pour un usage domestique.
Est-ce que le tempeh est bon pour la santé ?
Oui, il est riche en protéines, en fibres, et en micronutriments. Sa fermentation améliore la digestibilité du soja et confère des bénéfices postbiotiques intéressants.
Pourquoi le tempeh a-t-il parfois une odeur d’ammoniac ?
Une odeur forte peut indiquer une fermentation excessive ou une contamination. Un tempeh sain a une odeur de champignon et de noisette, pas d’ammoniac.
Comment cuisiner le tempeh pour le rendre savoureux ?
Il peut être mariné, grillé, sauté, frit, ou intégré dans des plats mijotés. Le faire précuire à la vapeur puis le faire mariner améliore sa texture et sa saveur.
Le tempeh est-il fermenté avec un champignon ou une bactérie ?
Principalement un champignon : Rhizopus oligosporus. Des bactéries peuvent être présentes, mais elles jouent un rôle secondaire.
Peut-on congeler le tempeh ?
Oui, il se congèle très bien, que ce soit cru ou précuit. Cela n’altère pas sa qualité nutritionnelle ni sa texture de façon significative.
Le tempeh peut-il remplacer la viande ?
Oui, surtout dans les régimes végétariens et végétaliens. Il est riche en protéines complètes, en fer et en zinc, surtout lorsqu’il est bien préparé.
Le tempeh est-il adapté aux enfants ?
Oui, en portions modérées et bien cuisiné. Il constitue une bonne source de protéines végétales pour les enfants, à condition d’introduire progressivement les aliments fermentés.
Quelle est la durée de conservation du tempeh ?
Frais, il se conserve une semaine au réfrigérateur. Sous vide ou pasteurisé, il peut se conserver plusieurs mois. Une fois ouvert, il doit être consommé rapidement.


